Les autorités sanitaires camerounaises annonçaient en fin mars le pic à 2 500 cas, au 30 juin 2020, le Cameroun a franchi la barre des 12 529 cas confirmés. Pendant ce temps, le Ministre de la Santé quant à lui, annonçait le pic vers le 15 juin. Après vérification des indicateurs, il n’en est rien et les cas s’accumulent mettant en lumière, une mauvaise maitrise des données.

« Nous avons prédit ce pic au 31 (mai, ndlr). L’assouplissement des mesures au niveau de la population a produit un décalage de ce pic. Et aujourd’hui, les nouvelles prédictions de pic se situent autour du 10-15 juin » déclarait le Ministre de la Santé Publique, Manaouda Malachie le 07 juin 2020 au cours de son passage à « Dimanche Midi », un magazine très suivi du poste National de la Crtv. Rendu au 1er juillet 2020, les données officielles, confrontées à celles de l’OMS montrent une curiosité. Celle-ci bat en brèche les prédictions de l’autorité sanitaire du pays.

Intervalle annoncé pour l’atteinte du Pic par les autorités sanitaires camerounaises.

                                                       Source: OMS/DataViz by ADISI-Cameroun

En effet, à l’analyse de ces données, le plus haut point culminant en therme de cas confirmés avant le 10 juin 2020 a été atteint le 18 Mai 2020 avec 1 353 cas de contamination confirmées. Dès lors, la courbe du graphique montre une évolution de la maladie au 1er juillet 2020. D’après le Ministère de la Santé publique du Cameroun : 14 711 cas déclarés positifs, 11 014 guérisons contre 328 décès de la Covid-19.

Selon le Dr Albert Ze, économiste de la santé, Fondateur de l’Institut de Recherche pour la Santé et le Développement (IRESADE) sur sa page facebook le 27 avril 2020, « le pic épidémique correspond à la situation où le nombre maximum de personnes infectées est atteint. Ce pic peut donc être séquencé en trois portions : le pic des transmissions, le pic des hospitalisations, et le pic de mortalité. Une fois le pic épidémique atteint, il se fait suivre d’une réduction du nombre de contaminations. De ce fait, la courbe de l’épidémie s’infléchit et entame sa décroissance, une baisse du nombre de cas ».

Or, en regardant les données notamment sur le nombre de contamination, la courbe n’infléchi pas du tout. Bien au contraire. A titre d’illustration, le 24 juin 2020, le Cameroun a connu 149 cas confirmés, 229 le lendemain et 322 le 26 juin pour se situer à 1 445 le 6 juillet. C’est-à-dire, plus de deux semaines après la date escomptée.

Il en est de même du nombre de décès. 55 morts le 13 juin restant jusqu’ici le plus haut nombre de décès journalier. Si le lendemain on est retombé à zéro mort, sur les jours qui suivaient, les données indiquent une montée. C’est-à-dire 5 décès le 15 juin pour 18 morts le 22 juin 2020.

En prenant les cas les plus extrêmes par mois, on note une nette montée de la pandémie au fil des jours

                                                    Source: OMS/DataViz by ADISI-Cameroun

 

Indice d’une progression

A la lumière du déploiement du gouvernement qui se fait desormais sans trompette ni tambour, des indices montrent bien, qu’on n’a pas atteint le point culminant « entre le 10 et le 15 juin » tel qu’indiqué par le gouvernement. Outre le fait que le ministre a cessé de faire des tweets sur les cas de contamination, de morts et de guérison, Manaouda Malachie a restructuré la politique de communication de son département ministériel courant juin 2020. Desormais, les communications son hebdomadaires au lieu de quotidien. C’est du moins le cas depuis fin juin.

Si on peut y voir un signe d’essoufflement, l’organisation logistique montre que la progression de la Covid-19 a encore de beaux jours devant elle. A titre d’exemple, les villes de Bertoua à l’Est et Ebolowa au Sud, se sont vues dotées et aménagées fin juin 2020, de nouveaux espaces pour accueillir de nouveaux patients.

Sur le cas des données liées à la progression de la pandémie, les indicateurs comparés du Ministère camerounais de la santé et ceux de l’OMS indiquent une nette progression aussi bien sur les cas des morts, 342 au 06 juillet et 14 524 cas de contaminations sur la même période.

Fiabilité des données

« Notre dispositif de dépistage ne fonctionne pas encore à l’optimum » avertit le Dr Albert Zé. Corroborant ainsi plusieurs témoignages de patients recueillis sur le terrain. « Quand je me suis fait dépister à Yaoundé, mon premier test réalisé par voie nasale était positif. J’ai refait un test sanguin au centre médical français, cette fois-ci, il était négatif », confesse Julie.

Selon le Dr Moulion Tapouh, membre du Conseil de l’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC), il existe plusieurs types de tests dont aucun n’est fiable de manière totale et absolue. « Ces examens ne doivent être faits que par des spécialistes de la question, qui en connaissent les limites éventuelles et savent exactement les interpréter » postule-t-il. « Nous déplorons ici le commerce macabre qui s’est installé dans la réalisation de ces tests avec des instruments de qualité douteuse entre les mains de personnes non averties, ajoutant ainsi la confusion dans l’esprit des populations », poursuit-il.

Aussi, c’est le 06 mars 2020 que le ministre de la Santé, le Dr Manaouda Malachie indiquait dans un communiqué, le premier cas au Cameroun. Pourtant dans le dispositif de comptage de l’OMS, à cette même date, le Cameroun comptait déjà 02 cas selon cette institution onusienne.

Paul- Joel Kamtchang