Comment Opérer une grossesse extra-utérine sans ouvrir le ventre

Dr. Steve Anangue a publié le 16 mars 2024 dans le groupe Facebook Kerel Kongossa, qu’il est possible d’opérer une grossesse extra-utérine sans ouvrir le ventre opérer une grossesse extra-utérine en Gynécologie . Après vérification sur des sites spécialisés en santé et auprès des spécialistes de la gynécologie, cette information est correcte et la pratique se fait au Cameroun.

Le 16 mars 2024, Dr Steve Anangue, gynécologue résident, écrit dans le groupe privé Facebook Kerel Kongossa (officiel) : « C’est possible d’opérer la grossesse extra-utérine sans ouvrir le ventre. Beaucoup encore ne le savent pas ». La publication est accompagnée de l’image d’une femme allongée et dont l’abdomen contient trois bandages.

Le groupe privé  Kerel Kongossa (officiel) est présenté comme une plateforme de distraction, avec pour principales thématiques les faits de société, l’actualité, les blagues et l’amour. Au 9 octobre 2024, il a enregistré plus de 660 000 membres opérer une grossesse extra-utérine en Gynécologie . Tandis que le post a enregistré plus de 500 commentaires et plus de 3 000 emojis au 30 mars 2024.

L’auteur a, en plus de publier sur la page Kerel Kongossa(officiel), partagé le même post sur sa page Facebook dénommée Dr Steve Anangue. Cette publication intervient dans le cadre d’une série de posts que ce gynécologue résident a lancée sur la grossesse extra-utérine. D’ailleurs, le jour suivant la publication qui fait l’objet de notre vérification, Dr Steve Anangue a fait un autre post dans lequel il explique les causes de la grossesse extra-utérine, ainsi que le traitement médical indiqué.

Vérification

DataCheck a contacté via Messenger, le Dr Steve Anangue, pour plus de détails sur sa déclaration.  « Ça s’appelle coelioscopie opératoire ou chirurgie à ventre fermé. Le principe est qu’on crée de l’espace dans le ventre qui est une cavité fermée, en le gonflant avec du gaz… le CO2. Ensuite on y introduit une caméra à l’aide de petits trous qu’on aura créés et des pinces pour pouvoir y travailler », explique-t-il.

Acteur de ma santé, un site spécialisé sur les questions de santé mentale et reproductive, entre autres, fait savoir que la cœlioscopie, encore appelée laparoscopie est une technique chirurgicale permettant la visualisation des organes à savoir ici l’utérus, les trompes utérines et les ovaires situés à l’intérieur de la cavité abdominale à l’aide d’un appareil d’optique de 10 mm de diamètre. « Il est introduit par une petite incision, le plus souvent au niveau du nombril. Les images de l’intérieur de l’abdomen sont transmises sur un écran visible par le chirurgien », lit DataCheck.

D’après le document, la cœlioscopie opératoire permet la réalisation du geste chirurgical sans ouverture du ventre. Pour cela, 2 à 3 incisions en sus pubien (de 5 mm) sont nécessaires pour y glisser divers instruments tels que les pinces, les ciseaux et le matériel de coagulation.

Sur cette pratique au Cameroun, Dr. Steve Anangue déclare qu’elle date des années 2000. « Le pionnier est le Chracehr [Centre Hospitalier de Recherche et d’Application en Chirurgie Endoscopique Et Reproduction humaine]. Cela a été l’initiative du Pr Kasia. Maintenant on le fait dans beaucoup de structures CHU [Centre hospitalier universitaire], à l’Hôpital général, Hôpital gynéco obstétrique de Yaoundé et dans beaucoup d’autres centres privés », indique-t-il.

Joint via Whatsapp, Dr. Grégoire Atangana, gynécologue, affirme que l’opération d’une grossesse extra-utérine peut se faire sans ouvrir le ventre. Notamment « en pratiquant la cœlioscopie avec possibilité de transfusion sanguine dans les cas les plus sévères », confie-t-il.

Dr Yannick Messakop, qui est également gynécologue, va dans le même sens et mentionne lui aussi, la coelioscopie. « En fait, la coelioscopie fait partie de la grande famille des chirurgies endoscopiques. On a plusieurs types d’endoscopies. On peut faire l’endoscopie de la gorge, des oreilles, du cœur et aussi de l’abdomen. La chirurgie endoscopique de l’abdomen est ce qu’on appelle la cœlioscopie (…) Elle permet d’explorer la cavité abdominale avec une caméra qu’on appelle un endoscope et avec pour but soit de poser un diagnostic, ça veut dire voir la maladie ou de poser un geste ça veut dire opérer pour enlever une maladie ou pour traiter une maladie », explique Dr Messakop.

Durant une pratique de cœlioscopie

Durant une pratique de cœlioscopie © Dr. Benedicte-henry

C’est quoi une grossesse extra utérine ?

Selon le Dr. Grégoire Atangana, la grossesse extra-utérine (GEU) est de façon simple, la formation d’un œuf hors de la paroi de l’utérus, mais dans l’abdomen, la trompe de Fallope ou l’ovaire. « Cet œuf peut subir un éclatement d’un vaisseau et on parle de GEU rompue droite ou gauche, provoquant une dissémination du sang dans l’abdomen appelé hémopéritoine. On parle encore de grossesse ectopique dans d’autres circonstances », explique Dr. Grégoire Atangana en listant quelques symptômes « À l’arrivée, la patiente se plaint de fortes douleurs pelviennes, d’une hémorragie génitale parfois absente chez d’autres, d’une fièvre parfois accompagnée de vomissement et de fortes douleurs abdominales. Dans ce tableau, le diagnostic peut être douteux. Il revient donc au médecin de demander un test de grossesse suivie d’une béta HCG [une sous-unité de l’hormone chorionique gonadotrope (HCG)] plasmatique, qui confirmera le nombre de semaines exact de la grossesse ou une paracentèse (injection d’une seringue dans le flanc douloureux qui t’amènera du sang rouge vif) confirmant le diagnostic de GEU rompue », a ajouté Dr. Grégoire Atangana .

En effet, la prise en charge des grossesses extra-utérines dépend selon Dr Franquy Nkili Ayang, médecin généraliste, du score de Fernandez. Il soutient que le traitement médical de la grossesse extra-utérine est possible si le score est inférieur à (13). Au- delà, l’opinion chirurgicale prime. Cela « peut se faire selon 3 modalités : abstention médicale; le traitement médical et la chirurgie. La chirurgie peut se faire via deux modalités, notamment la laparotomie. Ici, on ouvre la paroi abdominale ou la cœlioscopie qui est cette modalité sans large incision de la paroi abdominale », déclare Dr Franquy Nkili Ayang.

A la question de savoir si la coelioscopie se pratique au Cameroun, Dr Messakop fait savoir qu’elle se pratique au  Centre hospitalier et régional d’Ebolowa, où il exerce comme chef service.  « Je vous annonce que notre hôpital est parmi le top 3 des hôpitaux où on pratique le plus d’endoscopie. Nous recevons les patients venant du Gabon, de la Guinée équatoriale et un peu partout au Cameroun », révèle le gynécologue.

Des prix non homologués

Dans ce centre, comme le laisse entendre Dr Yannick Messakop, le coût de la chirurgie endoscopique varie entre 200 000 et 250 000 F Cfa, contrairement à Yaoundé où le prix oscille entre 400 000 et 500 000 F Cfa. « Nous faisons environ 10 chirurgies endoscopiques par mois. Et pour un hôpital de cette catégorie, c’est formidable. En deux ans de pratique de l’endoscopie, on a fait 210 chirurgies, presque 225, si je me rappelle des dernières nouvelles. Notre hôpital est le centre d’application principal de la chirurgie endoscopique du Master de l’Université de Douala. Ça veut dire qu’ils viennent quand ils ont des séances de travail et de formation.  Quand je dis 200 à 225 malades, je ne compte pas les malades opérés lors des campagnes de santé. En plus, l’hôpital des sœurs de Simbock en fait.  Je pense que la clinique Marie Wyss à Nsimeyong le fait également », renseigne le Dr Yannick  Messakop.

Outre les hôpitaux cités plus haut, Dr Nkili informe que cette chirurgie s’effectue également à  l’hôpital général de Douala, à l’hôpital général de Yaoundé et dans les Centres hospitaliers régionaux (CHR) de tout le pays. Seulement, le coût est très variable. Je ne peux pas me prononcer », lance le médecin généraliste. Contrairement à lui, Dr Yannick Messakop n’hésite pas à apporter des détails sur cette opération qu’il dit varier en fonction de la typologie, du chirurgien et des centres hospitaliers. « Le coût de l’intervention est relativement cher en laparoscopie qu’en laparotomie opérer une grossesse extra-utérine en Gynécologie . Mais parfois, on prend en compte les complications qu’une malade peut avoir. Ce coût dépend du chirurgien et des hôpitaux. Les hôpitaux de Yaoundé font la chirurgie endoscopique à partir de 300 000 F Cfa. Ça c’est pour les hôpitaux les moins chers. Mais les hôpitaux les plus chers peuvent aller de 500 000 F Cfa à 800 000 F Cfa. Il y a même des hôpitaux qui le font à 1 million F Cfa, à Yaoundé.  Le problème c’est le matériel, il coûte très cher », précise Dr Yannick Messakop.

A la question de l’homologation des prix de cette chirurgie, Dr Yannick Messakop dit ne pas savoir s’il en existe. « Il n’y a pas de recommandation que je sache.  Mais à ma connaissance, il n’y a pas de recommandations fixes en rapport au coût d’une coelioscopie par le ministère de la Santé. Du moins, une note officielle sortie du ministère qui exige que cette intervention soit faite pour tel ou tel montant, il n’y en a pas », indique-t-il. Tandis que le Dr Grégoire Atangana souligne que « tout dépend du chirurgien et de l’urgence en question ».

Rendu au ministère de la Santé publique (Minsanté), la Cellule de communication nous a envoyés à la Direction de l’organisation des soins et de la technologie sanitaire (Dosts) opérer une grossesse extra-utérine en Gynécologie .  Seulement, DataCheck a été informé au secrétariat de ladite direction, que personne ne pouvait s’exprimer sur le sujet, sans l’autorisation du ministre de la Santé publique. Nous avons rédigé une demande qui a été déposée au service de ce ministère, et qui n’a pas eu de réponse jusqu’au moment de la publication de cet article.

En conclusion, l’information selon laquelle il est possible d’opérer une grossesse extra-utérine sans ouvrir le ventre est vraie et la pratique se fait au Cameroun. Des spécialistes de la santé dont des gynécologues et un médecin généraliste l’affirment.

Lorine Claudia AGNANG

Cet article a été rédigé dans le cadre de la 1ère cohorte des Académies de Fact-checking, initiée par ADISI-Cameroun avec l’appui technique de DataCheck et le soutien financier de l’Ambassade de France.